Après nous avoir fait voyager en Méditerranée, sur les bords du Nil, en Inde, au moment de la mousson, ou en Chine, dans le Jardin de Monsieur Li, le sellier de la rue du Faubourg Saint-Honoré nous convie sur la Lagune. Entre Hermès et les parfums, c’est un beau récit, c’est une belle histoire.
Si vous l’avez humé un jour, vous ne l’avez sans doute jamais oublié! Un Jardin en Méditerranée, le premier Jardin d’Hermès, a vu le jour en 2003. Réinventant les eaux fraîches dans un esprit beaucoup plus couture, sophistiqué et tenace, ce grand classique est signé Jean-Claude Ellena. Le mythique parfumeur de la maison Hermès avait adoubé Christine Nagel en 2014. Deux ans plus tard, celle-ci lui succédait à la tête de la création et du patrimoine olfactif d’Hermès Parfums.
En l’espace d’un peu plus de deux ans, Christine Nagel a déjà apposé sa griffe -éminemment personnelle et d’une grande liberté (le privilège qui est le sien chez Hermès)- sur pas moins de onze jus, dont un réel coup de coeur en ce qui me concerne, la cologne Rhubarbe écarlate, à découvrir absolument!
Le dernier-né, Un Jardin sur la lagune, traduit en notes liquides tout le charme d’un parc de villa abandonnée sur l’île de la Giudecca. Imaginez, dans la brume iodée d’un petit matin vénitien, des branches de magnolia, de lys et de pittosporum nimbées de notes marines et boisées. Ce bel oriental boisé et délicatement floral plaira tant aux femmes qu’aux hommes.
C’est d’ailleurs le cas de tous les opus de la collection, pensés pour séduire loin de tout diktat, sans aucun test marketing préalable… quel bonheur!
-Un Jardin en Méditerranée (floral aquatique, 2003)
-Un Jardin sur le Nil (hespéridé habillé de figue et de bois, 2005)
-Un Jardin après la mousson (boisé épicé, 2008)
-Un Jardin sur le toit (aromatique fruité, 2011)
-Le Jardin de Monsieur Li (hespéridé aromatique, 2015)
-Un Jardin sur la lagune (Oriental floral, 2019)

Interview
Christine Nagel, magicienne de la matière
Native de Genève, Christine Nagel a pris en 2016 la succession de Jean-Claude Ellena chez Hermès. Elle nous confie sa vision d’un métier qu’elle aborde avec sensibilité, et même sensualité.
-D’où vous vient votre vocation olfactive ? J’y suis arrivée tard. Elevée loin de l’univers de la parfumerie, cela date de mes études en chimie organique et de mes débuts chez Firmenich. Un jour, j’ai vu Alberto Morillas faire sentir ses essais à deux jeunes femmes : j’ai ressenti leurs émotions. A cet instant, j’ai su que ce métier était fait pour moi !

-Vous êtes (avec Mathilde Laurent) l’une des rares parfumeuses attachées à une maison. Les femmes ont une perception des notes bien à elles ?
Je pense que c’est plus une question de sensibilité et de style. Ma parfumerie est tactile. Rodin disait : « Pour donner de l’ampleur à mes figures, je les exagère et j’obtiens plus de vie ». C’est vrai de mes parfums : j’accentue le trait, je force la matière.
-Etre le nez exclusif d’une maison vous apporte-t-il plus de liberté créative ?
Bien sûr, en particulier chez Hermès ! Il n’y a pas d’études marketing, pas de panel consommateur. On part d’une page blanche. C’est grande responsabilité, d’autant que le parfum est peut-être le premier objet accessible de la Maison Hermès.
-Quelle est votre matière première favorite ?
Je n’ai aucun a priori sur les matières. Lorsque j’en découvre une, je veux la malaxer et expérimenter. J’aime travailler court, avec peu d’ingrédients, car je suis convaincue que l’essentiel est forcément simple.
Infos: Les parfums Hermès connaissent un grand succès, avec une croissance à deux chiffres. Surfant sur cette vague, la maison se lancera en 2020 sur le secteur de la cosmétique. Affaire à suivre!
Eau de toilette Un Jardin sur la Lagune (79 € 50ml ; 113 € 100ml), dans les boutiques Hermès et dans une sélection de parfumeries.